Le Pape, serviteur des serviteurs de Dieu
- Paroisse de Lasne
- 30 avr.
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1. Le Christ est ressuscité ! Avec encore plus d'émotion dans le cadre d'une célébration de suffrage telle que celle des Novendiali, nous chantons l'Alléluia pascal, ce chant qui a résonné de la voix du diacre « Nuntio vobis gaudium magnum quod est Alleluia », même dans cette basilique qui, quelques instants avant la veillée, avait été visitée par le Saint-Père François. Sans le savoir, il se préparait à traverser une autre mer Rouge, une autre nuit que la résurrection du Christ nous permet d'appeler bénie, la nuit dont il est dit «et nox sicut dies illuminabitur».
Dans quelques jours, le cardinal proto-diacre utilisera une formule similaire pour annoncer à l'Église et au monde le gaudium magnum d'avoir un nouveau Pape : c'est à partir de l'expérience pascale du Christ que prend tout son sens le ministère du Successeur de Pierre, appelé en tout temps à vivre les paroles que nous venons d'entendre dans l'Évangile : « Et toi, une fois converti, confirme tes frères ». Pierre confirme ses frères dans la foi que le Crucifié est le Ressuscité, le Vivant pour toujours. La célébration des Novendiali pour le Pontife défunt constitue, pour différentes catégories et appartenances, l'accomplissement d'un rite de suffrage chrétien : idéalement, c'est aussi de cette manière que le Successeur de Pierre nous convoque pour nous confirmer, précisément parce que nous renouvelons notre profession de foi dans la résurrection de la chair, dans le pardon des péchés, même ceux d'un homme devenu Pontife, et dans le renouvellement de la conscience que l'unité de l'histoire de chaque personne est entre les mains de Dieu.
2. Aujourd'hui, ce sont les Pères Cardinaux qui sont appelés à participer aux Novemdiales, étape presque centrale de ce cheminement ecclésial, en se réunissant en prière comme Collegium et en confiant au Seigneur celui dont ils ont été les premiers collaborateurs et conseillers, ou du moins ont cherché à l'être, dans la Curie romaine comme dans les diocèses du monde entier. Idéalement, cependant, chacun de nous, vénérables frères, porte en lui les personnes pour lesquelles et avec lesquelles il est appelé à vivre son service : de Tonga et des îles du Pacifique aux steppes de Mongolie, de l'ancienne Perse et Téhéran au lieu d'où a jailli l'annonce du salut, Jérusalem, des lieux alors florissants du christianisme et aujourd'hui demeure d'un petit troupeau, marqués dans certains cas par le martyre, comme le Maroc et l'Algérie, pour ne citer que quelques coordonnées géographiques que le Saint-Père a voulu esquisser au cours de ces dernières années en convoquant de fréquents Consistoires. Dans tous ces lieux et continents, comme dans ces espaces de liaison que sont les bureaux de la Secrétairerie d'État et de la Curie romaine, en tant que successeurs des Apôtres, nous sommes appelés chaque jour à nous rappeler et à vivre avec conscience que « régner, c'est servir », comme le Maître et Seigneur, qui est parmi nous comme celui qui sert.
3. L'un des titres que la tradition attribue à l'évêque de Rome est en effet celui de Servus Servorum Dei, aimé de saint Grégoire le Grand depuis qu'il n'était encore que diacre, pour rappeler cette vérité constante : la liturgie nous le rappelle dans ses signes extérieurs, lorsque, lors des célébrations les plus solennelles, nous portons sous la chasuble la tunique, souvenir de notre devoir de toujours rester diacres, c'est-à-dire serviteurs. Le pape François l'a vécu en choisissant différents lieux de souffrance et de solitude pour accomplir le lavement des pieds pendant la messe de la Cène du Seigneur, mais aussi en s'agenouillant et en embrassant les pieds des dirigeants du Soudan du Sud, implorant le don de la paix, avec ce style que beaucoup jugent scandaleux, mais profondément évangélique, avec lequel saint Paul VI, le 4 décembre il y a cinquante ans, dans la chapelle Sixtine, s'est agenouillé pour baiser les pieds de Melitone, métropolite de Chalcédoine. La tradition de l'Église, chers frères cardinaux, nous divise en trois ordres : évêques, prêtres et diacres, mais nous sommes tous appelés à servir, en témoignant de l'Évangile usque ad effusionem sanguinis, comme nous l'avons juré le jour de notre création cardinalice et comme le signifie la pourpre que nous portons, en nous offrant, collectivement et individuellement, comme premiers collaborateurs du Successeur du bienheureux apôtre Pierre.
4. La première lecture, tirée du livre des Actes des Apôtres, nous ramène juste à l'extérieur du Cénacle de Jérusalem, où sont rassemblés des Juifs venus de toutes les nations sous le ciel. C'est Pierre qui prend la parole pour justifier ce qui s'est passé : les apôtres ne sont pas ivres et ne débitent pas des absurdités, mais, au contraire, précisément parce qu'ils sont imprégnés de cette sobria ebrietas de l'Esprit, comme elle sera appelée plus tard par la littérature patristique, ils peuvent être compris même par des peuples différents, chacun dans sa propre langue. Il est significatif que cette lecture ait été choisie dans les Novendiali : elle fait certainement référence à l'apôtre Pierre, puisqu'il s'agit de son premier discours, mais le contexte est celui de la Pentecôte qui vient d'avoir lieu. La référence temporelle indiquée par Luc est « alors que le jour de la Pentecôte s'achevait ». Que signifie cet achèvement ? C'est à la fois une fin, une arrivée à maturité et, par conséquent, un nouveau départ. L'évangéliste utilise ici le même verbe qu'il avait employé au chapitre 9 de l'Évangile, lorsque, après la Transfiguration, en descendant de la montagne, « alors que s'accomplissaient les jours où il devait être élevé », Jésus durcit son visage en se dirigeant vers Jérusalem, où s'accompliraient les Écritures qui le concernaient, comme il le rappela ensuite à ses disciples égarés sur le chemin d'Emmaüs. Après le sommet de la Transfiguration, le chemin vers l'accomplissement des prophéties à Pâques à Jérusalem ; après Pâques, l'attente de l'Esprit à la Pentecôte, avec la plénitude du don de l'Esprit, le début de l'Église. Nous vivons le passage entre la fin de la vie du successeur de Pierre, le pape François, et l'accomplissement de la promesse afin que, par la nouvelle effusion de l'Esprit, l'Église du Christ puisse poursuivre son chemin parmi les hommes avec un nouveau Pasteur. Mais quelle prophétie s'accomplit à la Pentecôte ? Celle que la péricope liturgique a omise, mais qui était si chère et si souvent citée par le pape François, contenue dans le troisième chapitre de Joël : « Je répandrai mon Esprit sur toute chair ; vos fils et vos filles prophétiseront, vos jeunes gens auront des visions et vos vieillards auront des songes... Quiconque invoquera le nom du Seigneur sera sauvé. » Notre cher Saint-Père aimait la répéter pour parler de la rencontre et du dialogue entre les générations, de la nécessité pour les personnes âgées de raconter leurs rêves aux jeunes, et pour ces derniers, avec leur énergie et leur vision, de savoir les traduire en réalité avec l'aide de Dieu. « Il n'y a pas d'avenir sans cette rencontre entre les personnes âgées et les jeunes ; il n'y a pas de croissance sans racines et il n'y a pas d'épanouissement sans nouveaux bourgeons. Jamais prophétie sans mémoire, jamais mémoire sans prophétie ; et toujours rencontre ». D'une certaine manière, le pape François laisse également ces paroles au Collège cardinalice, composé de jeunes et de personnes âgées, où tous peuvent se laisser enseigner par Dieu, deviner le rêve qu'Il a pour son Église et chercher à le réaliser avec un enthousiasme jeune et renouvelé.
5. Dans la Bulle d'indiction du Jubilé, le pape François a indiqué une vision, un rêve auquel nous devons déjà nous préparer et qui sera confié au nouveau Pontife : « Cette Année Sainte orientera le chemin vers une autre date fondamentale pour tous les chrétiens : en 2033, en effet, nous célébrerons les deux mille ans de la Rédemption accomplie par la passion, la mort et la résurrection du Seigneur Jésus. Nous sommes donc devant un chemin marqué par de grandes étapes, dans lesquelles la grâce de Dieu précède et accompagne le peuple qui marche avec zèle dans la foi, actif dans la charité et persévérant dans l'espérance (cf. 1 Th 1, 3). Spirituellement, nous serons tous des pèlerins sur les routes de la Terre Sainte, à Jérusalem, pour proclamer au monde depuis le Saint-Sépulcre – en espérant pouvoir le faire avec tous nos frères et sœurs que le baptême a consacrés – « Le Seigneur est vraiment ressuscité et il est apparu à Simon ! ».
6. Seigneur, nous te confions ton serviteur, le Pape François, afin que tu le combliez maintenant de joie en ta présence, et nous te demandons la grâce d'accomplir sa vision d'une Église qui annonce le mystère du Christ, crucifié et ressuscité ! Marie, Mère de Dieu et Mère de l'Église, intercède par ta prière pour celui qui a tant voulu fixer ton regard aimant, et qui repose maintenant dans la basilique qui t'est dédiée. Ainsi soit-il.
HOMÉLIE DU CARDINAL LEONARDO SANDRI
Basilique Saint-Pierre
Mercredi 30 avril 2025
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